Le Thon est là !

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Le Thon est là !

D'un geste du doigt, Youn le patron modifiee la route du pilote automatique vers tribord. A mesure que le bateau approche, Joel, sur la passerelle, détaille ce qu'il voit dans les grandes jumelles. « La volaille travaille bien... C'est des gros, c'est des gros. » Aussitôt, Youn déclenche la sonnerie qui met tout le bateau en alerte. Chacun gagne en hâte sa place pour la manceuvre. En particulier ceux qui vont devoir lancer la senne. lls sont trois : deux hommes d'équipage et Jean-Claude, le maître de manoeuvre, qu'on appelle « bosco ». lls escaladent le filet bien plié à l'arriére et grimpent dans un petit bateau de 10 m accroché au-dessus, le « skiff». lls n'attendent qu'un ordre pour lancer le skiff à l'eau.

D'abord, observer le poisson

De leur côté, les hommes de la passerelle, tendus, attentifs, observent le poisson, son nombre, sa direction, sa vitesse. II faut évaluer très rapidement la situation. Le moteur donne toute sa puissance. Une première fois, le Glénan tourne autour du banc. Par phrases rapides, les hommes se communiquent ce qu'ils voient. La langue bretonne et le français se mélangent: « ll se presente pas bien », « Il est dispersé », « Il va dans toutes les directions, » « N'eo ket brav c'hoari da dapout anezhan » (il est difficile à attraper !)...

Sa casquette à visière sur les yeux, Youn, sur la passerelle, est tout attention. D'un signe de tête, il interroge le mieux placé, Marc, là-haut au nid de pie; il est tendu, il hésite. Une manceuvre lancée avec quelques minutes de retard, et le poisson est manqué.

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Faire un mur en cinq minutes

Tout d'un coup, Youn se détermine; il porte à ses lèvres le micro qu'il tient á la main. « Largue derrière !» lance-t-il sourdement. Dans une gerbe d'écume, le skiff glisse à l'eau. Il joue le rôle d'une ancre flottante: il reste immobile sur l'eau et retient une extrémité du filet. Tout va très vite. De toute la puissance de ses 3 500 chevaux, le Glénan entame un grand cercle autour du banc de thons. I1 file 15 neuds (27 km/h), sa vitesse maximale. Dans les tourbillons du sillage, l'immense filet se déplie.

En quelques minutes, le poisson se trouve cerné par une gigantesque muraille de nylon tressé qui lui barre la route jusqu'à 140 m de profondeur. Sa seule issue, plonger vers le fond. II faut qu'il fasse vite, car pour l'emprisonner, Raymond a mis en route le treuil qui referme le bas du filet. Il lui faut près d'une demi-heure venir à bout des 1 500 mètres de câble d'acier. Maintenant, le fond de la senne est resserré comme une bourse, le piège est fermé.

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